Le 19 juillet 1952 : les hameaux de Merley, la Boutonne et la Cote sont enfin rattachés à Villars.

Il a fallu plus d’un siècle pour que les demandes des habitants et la raison l’emportent. Avant, tous ces hameaux du secteur ouest de la commune dépendaient de Saint-Genest-Lerpt.
C’est par décret ministériel du 19 juillet 1952 qu’on retrouve la trace officielle du rattachement à la commune de Villars des hameaux de Merley et de la Boutonne, d’une partie de celui de Bourgeat et des domaines de la Cote et de l’Hayassière. Ces trois hameaux et tout le secteur actuellement occupé par la zone commerciale d’Auchan étaient jusqu’à cette date situés sur le périmètre de la commune voisine de Saint-Genest-Lerpt dont la limite se situait à Bourgeat au carrefour du chemin de Merley et jusqu’à Montravel (autrefois appelé Grangeneuve). Il suffit d’ailleurs de consulter les plans de l’ancien cadastre napoléonien en ligne sur le site des archives départementales pour retrouver ce qu’était auparavant ce périmètre.
En fait, ce que l’histoire a aujourd’hui oublié, c’est qu’il a fallu plus d’un siècle de démarches et parfois de protestations pour que les habitants de ce secteur voient enfin reconnues leurs légitimes attentes. Domiciliés à un jet de pierre du centre de Villars, ils devaient par contre se rendre à Saint-Genest dont le bourg était distant de 4 km via de mauvais chemins pour tout ce qui concernait l’état-civil, la paroisse et la scolarisation de leurs enfants. Sans oublier taxes, impôts et centime additionnel dont ils devaient s’acquitter coté Saint-Genest. Autre problème particulièrement sensible celui concernant les fontaines publiques et d’adduction d’eau, là encore dépendant de Saint-Genest.
La logique, la raison et la géographie des lieux auraient voulu qu’un redécoupage des limites des communes soit rapidement opéré. Ce ne fut pas le cas. Si on retrouve trace à plusieurs occasions des demandes des habitants dans les délibérations du conseil municipal de Villars, une première démarche officielle a été instruite à partir de 1846.
M. Plotton cultivateur résidant au quartier de la Boutonne était alors le meneur des pétitionnaires. Ses courriers, restés sans réponse, se sont ensuite étoffés d’une pétition signée des habitants du secteur concerné. Benoit Cholle en devint un des leaders et son rôle fut particulièrement important.
Un referendum en 1849
Le préfet, maintes fois sollicité, dut se résoudre à déclencher une longue procédure qui dura trois années. Il fallut précisément cadastrer la parcelle de terrain puis consulter les conseils municipaux des deux communes concernées, prendre l’avis de la population et présenter les conclusions au Conseil général.
Saint-Genest-Lerpt comptait alors 1700 âmes pour une surface de 1428 hectares et Villars 700 habitants pour 392 hectares. L’enjeu portait sur le rattachement de seulement 13 maisons, comptant alors 86 habitants sur une vaste parcelle de terrain de 164 hectares.
Le dimanche 15 avril 1849, un référendum fut organisé en mairie de Saint-Genest-Lerpt par le juge de paix du canton. Fait notable, Benoit Cholle, meneur des pétitionnaires, était devenu en 1848 maire de Saint-Genest-Lerpt et il se retrouva confronté à l’opposition ferme et quasi unanime de ses administrés. Face à lui le curé Faure et André Colcombet, un riche notable de la commune, se chargèrent de mobiliser ouailles et administrés. Par une écrasante majorité (10 voix pour et 349 contre) le projet fut repoussé par la population. Le conseil municipal de Saint-Genest fit de même, à l’exception de son maire, mis en minorité. D’autant que le récent redécoupage de la proche paroisse de Roche-la-Molière présentait aux yeux du curé bien d’autres inconvénients. Le sujet devint polémique. Perdre Merley et La Boutonne soit, mais à condition de récupérer du terrain par ailleurs. La population locale y vit le risque d’augmentation de l’impôt et les habitants du quartier génésien de Côte-Chaude évoquèrent leur possible demande de rattachement à la ville de Saint-Étienne. Le Conseil général de la Loire finit donc le 29 août 1849 par émettre un avis négatif à ce remembrement entre deux communes certes limitrophes mais de plus situées sur deux cantons différentes (celui de Chambon-Feugerolles et celui de Saint-Héand).
Villars revient à la charge en 1875.
À l’automne 1875, sous le mandat d’Auguste Guitton, maire de Villars et à l’entregent particulièrement actif, le sujet revint sur la table du conseil municipal. Les élus villardaires sollicitèrent à nouveau le préfet, reprenant la même argumentation que leurs prédécesseurs. La population des hameaux concernés était alors de 125 habitants pour 20 maisons concernées. Villars abritait 2300 âmes et Saint-Genest-Lerpt 2800.
Les démarches reprirent, Saint-Genest demandant cette fois en compensation de récupérer des hameaux enclavés de Roche-la-Molière, ce que cette dernière commune refusa tout net. Quinze années s’écoulèrent encore et le dossier redevint d’actualité en 1890 avec l’extension du réseau d’eau de la ville de Saint-Étienne.

Les habitants de Bourgeat demandèrent fort logiquement de bénéficier d’un tel service. Mais il fallut encore bien des tractations pour financer ce projet. Les habitants durent payer les dépenses de canalisation, d’embranchement et d’établissement de la borne fontaine. Les deux communes cofinancèrent l’abonnement à raison de 30 hectolitres par jour.
Avec le problème de la fourniture d’eau, la nécessité d’un rattachement semblait encore plus… couler de source. Mais les décennies et deux guerres mondiales se succédèrent, sans grand changement pour les hameaux concernés.
C’est sous le bref mandat de François Binet, en 1947, que le projet pris enfin une tournure décisive, toutes les parties étant enfin d’accord sur le principe. En 1950 (Georges Gillier maire), la procédure finale était définitivement lancée. Mais il fallut encore attendre le 19 juillet 1952, pour que le rattachement à Villars soit officialisé. Il fallut alors débourser 1 million de francs pour amener l’eau au robinet avec là encore une participation des habitants.
C’est désormais le petit ruisseau du Rieudelet et le RD15 qui marquent la limite géographique des deux communes dans ce secteur. Villars y a gagné plus d’un quart de sa surface au sol et s’étend désormais sur 570 hectares.
Sources : archives départementales, mairie de Villars, mairie de Saint-Genest-Lerpt.
©H&P-Pierre THIOLIÈRE