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Un réfugié italien sur le monument aux morts.

Sa famille avait fui le fascisme italien en 1923 pour s’installer en France, lui a été arrêté au Bois-Monzil et il est mort en déportation en Allemagne en 1944.

Après 80 ans d’oubli, son nom vient d’être rajouté sur le monument aux morts de la commune car Babilla Calcatelli, sujet italien, n’a laissé qu’une trace éphémère de son passage à Villars. Mais dans les registres de l’état civil, la transcription de son décès apparait en 1949 avec la mention marginale « mort pour la France » et quelques bribes d’informations sur les circonstances de sa disparition.

On sait aujourd’hui de lui qu’il est né le 17 mars 1915 à Arcévia, dans la région des Marches en Italie centrale. Son père (Medardo) est engagé en politique dans la période très agitée qui suit la Grande-Guerre. En novembre 1919, il est candidat (battu) aux élections législatives sous les couleurs du parti socialiste uni qui va se désagréger pour donner naissance au parti communiste italien. Il en devient membre du comité central.

Dans un pays qui progressivement épouse la cause du fascisme, Medardo Calcatelli est devenu une cible des chemises noires. Tenancier d’une petite auberge, il est victime d’un raid violent des fascistes car il cachait les documents de la Bourse du travail. Sa sécurité n’est plus assurée il doit donc se résoudre à prendre le chemin de l’exil. Seul son fils aîné, Girolamo, sur le point de se marier, reste au pays où il décède dans des conditions non élucidées en 1927 à l’âge de 25 ans.

La famille Calcatelli fait son entrée en France en septembre 1923 en Lorraine. Babilla (ou Balilla selon les sources) est le petit dernier. Ses deux grands frères se marient et deviennent mécanicien et ajusteur. Lui est embauché dans une entreprise de travaux publics nommée Campenon-Bernard. En 1933 il est victime d’un grave accident du travail. Il devient ensuite ouvrier agricole et va de ferme en ferme. En 1936 il laisse une trace de son passage à Sorbey dans la Meuse puis en 1939 à Doncourt (Meurthe-et-Moselle). Il y travaille avec un ami originaire de région lyonnaise. Est-ce cette rencontre qui le conduit à rejoindre la zone libre après la débâcle de juin 1940 ? C’est une hypothèse.

Il obtient la nationalité française en mai 1939. On le retrouve ensuite à Villars, au Bois-Monzil où il loue un chambre au-dessus du café Félix. Il travaille comme jardinier. C’est là qu’il sera arrêté le 10 mars 1943 par la police allemande qui entend bien le soumettre aux obligations du service du travail obligatoire. Il ne semble pas être fiché à la Sureté nationale comme le sont ses frères et son père (ce dernier, suspecté de propagande communiste active et dénoncé par le consul d’Italie a d’ailleurs était expulsé de France de 1929 à 1936. L’arrivée au pouvoir du Front populaire et l’intervention de la Ligue des droits de l’Homme lui permettront de rejoindre sa famille après un exil forcé de 7 ans au Luxembourg).

Babilla Calcatelli est néanmoins déporté à Koenigsberg en Allemagne d’où il n’est pas revenu.
Il faut attendre janvier 1949 pour que le tribunal de Saint-Étienne fixe son décès au 5 décembre 1944, date à laquelle il a donné des nouvelles pour la dernière fois. Il n’a jamais été retrouvé.

Sources : état civil de Villars ; Mémoire des Hommes ; Archives nationales.
©H&P-Pierre THIOLIÈRE

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