La triste destinée de la famille Montélimard
Retracer l’histoire de cette famille n’a pas été chose facile, car à l’état civil ce patronyme a été transcrit avec des orthographes très variables. Au départ on trouve le nom Montéraimard qui devient Montérimard, Montereymard, Montalymard, puis Monthélimard ou Montélimart pour enfin s’écrire Montélimard, orthographe que l’on retiendra pour ce récit.

Le père disparaît.
Un sort particulièrement défavorable s’est acharné sur cette famille dont le parcours a été ponctué de drames et de décès…
Jusqu’en 1846, Claude, le père, est cultivateur à Raucoules. Il a alors 52 ans. On sait qu’avec son épouse Anne Mounier, ils ont eu au moins six enfants (deux garçons et quatre filles) dont cinq ont laissé une trace à Villars.
Claude est porté disparu durant cette année 1846. On ne connait pas précisément les circonstances de cet événement mais on en trouve trace lors du mariage de ses filles avec la mention du greffe du tribunal civil de Saint-Étienne évoquant « une déclaration d’absence et de disparition ».
C’est visiblement après ce triste événement que la famille quitte la Haute Loire pour venir s’installer à Villars.
Un fils mort à la mine.

En 1850, nouveau drame avec le décès de Pierre, le fils ainé. Le 3 juillet à 15h, un coup de grisou à la fendue Villars fait un mort et quatre blessés gravement brulés qui décéderont tous dans les jours suivants. Pierre Montélimard âgé de 25 ans, meurt ainsi le 4 juillet à 22h au domicile d’Étienne Édouard, l’ingénieur des mines (dans l’actuelle mairie).
Comme c’est lui qui faisait vivre sa famille, sa mère va alors toucher pendant quelques temps une pension de la Compagnie des Mines.
Son jeune frère Jean Pierre va à son tour descendre au fond pour travailler à la mine à Villars. Mais il a aussi l’âge des obligations militaires. A-t-il été désigné par le tirage au sort ou a-t-il fait le choix délibéré de remplacer un autre conscrit contre compensation financière (c’était possible à l’époque) ? On ne le sait pas précisément. Toujours est-il que le voilà mobilisé et, qui plus est, appelé à combattre.
Un fils mort à la guerre.

Car de 1853 à 1856, pour lutter pour l’expansionnisme russe, les troupes françaises rejoignent une coalition dans ce qu’on appellera la guerre de Crimée. Ce conflit durera deux ans et demi avec des faits marquants comme la bataille de l’Alma et le siège de Sébastopol qui conduiront à la défaite russe. 310 000 soldats français furent mobilisés et 95 000 morts comptabilisés dans leurs rangs pour une large partie à cause du choléra et du typhus.
Soldat au 2è Régiment d’Artillerie, Jean Pierre Montélimard est décédé sur le chemin du retour à l’hôpital de Constantinople (actuelle Istanbul) le 28 avril 1856, un mois après la fin des combats, probablement de maladie. Il était âgé de 23 ans. Il faudra plus de quatre mois pour que la transcription de son décès arrive à la mairie de Villars.
Trois nouveaux drames.

Au printemps 1855, Marie Françoise, l’ainée des filles, s’était mariée à Villars avec Jean Bru, un mineur natif de Dordogne. Deux ans plus tard devait naitre une fille prénommée Rose. Mais l’année 1858 était marquée de nouveaux drames en série. Au mois de mai, Marie Françoise décédait à l’âge de 27 ans. De maladie ou de fausse couche ? On ne le sait pas. Sa petite fille Rose la suivait dans la tombe au mois d’août, elle avait seulement 15 mois. Quant au mari Jean Bru, le destin ne l’épargnera pas non plus, il sera tué par un coup de grisou au puits Beaunier en mai 1863.
La triste série continue.
Cette triste liste ne va pas en rester là. Marie Rose la plus jeune des filles, mariée à Villars en 1866 avec Joseph Zoppi, un mineur natif de Suisse, décède elle aussi prématurément en 1869 à l’âge de 30 ans. Son mari a alors abandonné le domicile familial. Lui survivra une fille Julie, a priori adoptée par la famille Rey de Villars, mais qui aura le malheur de perdre son mari deux ans après son mariage en 1901.
Catherine Julie, la dernière des filles Montélimard, n’a pas non plus été épargnée par le sort. Elle se marie en 1855 à Villars avec Mathieu Porte (mineur) dont elle a eu cinq enfants. Mais son mari, sous-gouverneur au puits Beaunier, se trouve malencontreusement coincé dans la cage du puits et meurt des suites de ses blessures à l’hôpital le 20 août 1866. Son jeune frère était aussi mort à la mine à la fendue Villars en 1854 à l’âge de 15 ans. Catherine est donc veuve à 30 ans. Elle se remariera avec un cafetier de Saint-Étienne.
La matriarche Anne Montélimard s’éteindra quant à elle en 1870 à l’âge de 80 ans. Elle aura pleuré avant cela la disparition de son mari, de ses deux fils, de sa fille, sa petite-fille et de deux de ses gendres. Triste époque.
Nota : Une autre famille Montélimard s’est ensuite installée à Villars après 1860, sans que des liens de parenté puissent être établis.
Sources : état civil, recensements de population.
©H&P-Pierre THIOLIÈRE