Quand Villars était une commune insalubre et dangereuse
La triste histoire de la famille RÈNE.
C’est une poignante histoire à la Zola, digne de figurer dans un chapitre de Germinal. C’est à Villars qu’elle s’est déroulée, il y a presque 160 ans. La famille RÈNE est alors venue s’installer ici pour y travailler à la mine. Le couple a eu sept enfants dont des triplés et des jumeaux. Cinq sont morts en bas âge. La dangerosité de la mine et le manque de salubrité de la commune les ont conduits à renoncer et à retourner travailler la terre. Voici cette histoire.
1860. La commune compte alors 1500 habitants. La Compagnie des Mines de la Loire y est le principal employeur. De quoi attirer de la main d’oeuvre à bon marché. C’est le cas d’Étienne RÈNE (nom parfois orthographié REYNE) et de son épouse Marie Rose (dite Rosalie) née ROBERT. Lui est natif de Chilhac en Haute-Loire où il était cultivateur. Elle était dentellière à Apinac, petit village du Forez où ils se sont connus et mariés en 1862. On leur parle alors de Villars où la mine embauche. Le couple s’installe dans le Bourg. Lui apprend le dur métier de houilleur. À peine neuf mois après le mariage voilà Marie Rose sur le point d’accoucher. L’enfantement est difficile car surprise ce n’est pas un, mais trois enfants qui vont naitre à Villars ce petit matin du 28 avril 1863. Dans l’ordre Philomène, Jules et Rosalie sont déclarés à l’état civil par le père et l’instituteur Claude CLAMARON, voisin de la famille. Des triplés ! c’est une première dans la commune et l’événement suscite curiosité mais aussi inquiétude. Car trois bouches à nourrir c’est beaucoup pour le sein maternel. D’autant qu’à cette époque les maladies infantiles sont nombreuses et le docteur coûte cher.
Des triplés, trois décès.
Les drames vont alors se succéder. Quinze jours après la naissance, Rosalie sera la première à décéder (le 13 mai). Quinze jours plus tard (le 28 mai) c’est Jules qui rend son dernier souffle. Philomène survivra seulement 9 mois pour s’éteindre à son tour le 26 janvier 1864. Aucun des triplés n’a hélas survécu.
Lorsqu’en décembre 1864 Marie Rose est de nouveau sur le point d’accoucher, elle joue la carte de la sécurité et retourne dans sa famille à Apinac où va naître Marie le 29 décembre. Mais une fois de plus le sort va s’acharner sur la famille RÈNE, la petite Marie s’éteignant à Villars 9 mois plus tard (le 2 octobre 1865). La variole, la rougeole et la typhoïde (jusqu’à l’arrivée de l’eau en 1875) font chaque année plusieurs victimes parmi la population locale.
Le 2 mars 1866, voit arriver avec espoir une cinquième naissance à Villars : une petite fille une nouvelle fois prénommée Marie. Elle survivra et se mariera. En plus de ces drames familiaux, Étienne découvre que la vie de mineur n’est pas de tout repos. Rien que sur Villars, l’année 1863 est jalonnée par 7 morts d’accidents, presque rien en regard du coup de grisou du 11 octobre 1867 qui fait 39 morts au puits Beaunier, là ou Étienne travaille. Heureusement il n’en est pas et chaque jour il lui faut retourner au fond extraire le charbon.
Sept enfants, cinq décès en bas âge.
Nouvelle surprise pour une mère décidément féconde et nouveau coup du sort le 8 septembre 1868 avec la naissance de jumeaux : Antoine qui ne vivra que 14 jours et Virginie qui elle survivra et se mariera plus tard.
Des sept enfants qu’a eu le couple (dont des triplés et des jumeaux), cinq décéderont donc en bas-âge à Villars. Étienne et son épouse ont pris leur décision : la mine est un métier trop dangereux et l’état sanitaire de la commune est inquiétant. La petite famille retourne donc cultiver la terre à Apinac où ses deux filles et se marieront.
Marie Rose s’éteindra en 1900 à l’âge de 68 ans et Étienne en 1911 à 74 ans.