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Rentrée des classes 1942

Le regretté Claudius DURAND nous avait raconté sa rentrée scolaire en 1942 à l’école de garçons du Bourg. Un témoignage que nous avons plaisir à publier et qui apporte un éclairage intéressant sur cette année de guerre.

Vous êtes né à Villars ?
Je suis né le 7 octobre 1930 rue des Écoles à Villars à l’angle de la rue de la République, dans la maison où se trouve aujourd’hui l’école de musique. J’avais comme voisins Henri et Catherine CARRIER, notre propriétaire était le père JOUVE avec sa femme et son fils, c’était des anciens bouchers.

Quels souvenirs gardez-vous de cette rentrée des classes de 1942 ?
Comme c’était la guerre la rentrée se faisait un peu plus tard. L’école se trouvait là où ça a été démoli, à la place de la poste. Les garçons étaient dans la partie haute et les filles en bas. Un mur séparait les deux écoles. Il ne fallait pas regarder par-dessus, c’était interdit de regarder les filles. Sinon on était puni, on avait des lignes à recopier. Ça n’empêchait pas d’aller y regarder de temps en temps !

Vous vous rappelez de vos enseignants ?
Pour cette rentrée de 1942 notre institutrice était Mme FAURE, la femme du directeur. Elle avait d’ailleurs remplacé son mari à la direction quand il a été mobilisé en 1939, mais il est assez vite revenu à son poste. Il a été maire de Villars à la Libération de 1944 à 1945 avant la municipalité BINET. Je garde de Mme FAURE le souvenir d’une femme sévère. Une fois elle m’avait privé de cantine. Le père MASSACRIER voulait nous apprendre la musique. Comme instituteur à l’école il y avait BAILLY, qui ensuite a écrit un livre. Il y avait aussi CALVY, un instituteur qui a fini truand.

Vous faisiez quand même des activités sportives ?
Le jeudi après-midi c’était journée de plein-air. Il y avait un grand remblai là où il y a le musée actuellement. À l’époque il n’y avait pas encore le stade Paul Bert, il n’y avait que celui du Platon. Les quatre classes de garçons, on montait sur le crassier et on y passait l’après-midi, on jouait au foot entre nous, on aimait courir, jouer à cache-cache, pendant que les instituteurs se promenaient. Le crassier fumait ! Mais pour moi ça n’a pas duré longtemps. En 1943 je suis parti chez les paysans. J’ai arrêté ma scolarité à 14 ans pile. Après je suis allé m’embaucher. Mon oncle GIDROL qui était comptable dans une petite fonderie m’a fait apprendre le métier de mouleur. Mon père est mort devant moi de la silicose, il ne voulait pas que j’aille à la mine.

C’était aussi les restrictions…
Au niveau alimentation, c’était les restrictions, c’était dur dans les maisons. Ma mère allait chercher le pain et le pesait, on comptait les morceaux. La cantine ça me faisait un repas de plus.
La cantine se trouvait entre les deux écoles des garçons et des filles. J’y mangeais tous les midis. On s’inscrivait le matin auprès de Mme FAURE. Un jour où j’avais fait le pitre avec mon copain VAYOLLE, j’ai été puni et privé de cantine. Je n’ai pas osé le dire à mes parents. Je suis parti me promener vers les Marronniers. Mais quand je suis revenu la mère GRANGE du Bois Monzil qui s’occupait de la cantine et qui était très gentille m’avait gardé ma part.
De la viande on n’en avait pas souvent, c’était plutôt des légumes. Avant la récréation on nous donnait dans toutes les classes une petite tranche de pain, elle était épaisse comme le petit doigt pas plus. Tout le monde y avait droit. De temps en temps, dessus, on nous y mettait de l’huile de foie de morue, moi je n’aimais pas ça. Pour ceux qui étaient un peu plus faibles, ils avaient parfois droit à une sardine. Pour le chauffage on avait un gros poêle, c’était chauffé le matin, heureusement le charbon ne manquait pas.

1942, c’était la guerre et une année difficile…
L’année avait commencé par la catastrophe minière de la Chana. Deux de mes camarades d’école y ont perdu leur père, Ferdinand CIEPLY et puis Marcel JAVELLE. Lui il habitait à Bourgeat et il avait déjà perdu sa mère. Il était à l’école avec nous quand le garde champêtre est venu le chercher pour lui dire que son beau-père qui s’appelait GOMEZ avait été trouvé.
Il y avait des réfugiés de guerre avec nous en classe comme les frères ZIELYK d’origine polonaise et les ROSESKO, les BARANEK, des gens qui venaient de l’est. Leurs pères travaillaient à la mine. Certains sont repartis après-guerre, d’autres sont restés ici à Villars.
À l’école on nous parlait de Pétain, il fallait faire des dessins qu’on lui envoyait et en retour on recevait une photo, mais je n’ai pas trop de souvenir de ça.

La 3è classe de 1942 :

1e rang assis de gauche à droite : SIRVAN, X, X, X, Jean GARNIER, Jacques GARNIER.
2è rang : X, VIALLY, X, X POULENARD, Etienne ZIELYK, Marcel JAVELLE.
3è rang : RASCLE, Marcel POULENARD, Gilbert PATOUILLARD, Pierre VAYOLLE, Nanou ROQUE.
4è rang : X, Pierre BERRY, X, X, ZIELYK, X, X, Julien FLAVIEN, Mme Marthe FAURE institutrice (épouse du directeur Henri FAURE).
5è rang en haut : Roger QUISON, X, Claudius DURAND, X, X, André DENIS, Antoine VIALLY, Fostino TOVINI.

 Propos recueillis en 2012 par Pierre THIOLIÈRE. Photo de classe fournie par Claudius DURAND. ©H&P-Pierre THIOLIÈRE

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